👶 Les futurs Einstein naissent-ils dans les livres ? | #17
Lire dès le plus jeune âge, est-ce que ça a vraiment un impact ? Pourquoi ? Comment ? Des bébés et des livres, ça commence au berceau !
Tu l’auras compris, cette semaine on ne parlera pas littérature mais albums, imagiers, comptines, Tchoupi et Cendrillon.
Échappons-nous dans un monde de sorcières, de maisons en barbe à papa, où les petites filles volent au bout de parapluies et où les lapins se délectent des mots caca boudin.
Retrouvons nos yeux d’enfants pour mieux se mettre à la hauteur des nôtres.
Je crois que c’est ce dont on a besoin en ce moment 🙏
Pas intéressé·e ? Tu peux nous quitter à la fin de l’édito (non sans avoir partagé la news avec tes ami·es (futur·es) parents 😉), et on se retrouve dans deux semaines avec un thème « de grand ».
Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, je voulais consacrer cet édito au soutien des librairies indépendantes.
Coup de pouce. 👍
Est-il utile de répéter qu’un livre a le même prix partout ? En librairie indépendante, à la FNAC, sur Amazon ou en maison de la presse (s’il est neuf)… Cela ne coûte donc rien de privilégier les achats en librairie (quand on le peut), acteurs incontournables de la chaîne du livre.
Si un projet de loi s’attaque aux frais de livraison des livres (pour tacler notamment le géant Amazon), il ne sera pas suffisant pour sauver certains de ces commerces de proximité et de première nécessité (faut-il un confinement pour le rappeler ?).
Les produits de loisir, souvent jugés onéreux, souffrent du contexte de crise et d’inflation… avec les libraires indépendant·es au premier plan.
Qu’est-ce qu’on peut faire ?
Continuer à les soutenir en privilégiant des achats en librairie indépendante quand on le peut.
En parler autour de soi pour sensibiliser à cette question (qui ne touche d’ailleurs pas que le monde du livre quand on voit l’ampleur de l’offre sur A…Z..).
Mobiliser son comité d’entreprise, association, collectivité… pour offrir des livres aux collaborateurs, en séminaire, ou pour les cadeaux clients de fin d’année. Passer une commande groupée auprès d’une librairie indépendante, c’est la garantie d’avoir un service, des conseils sur mesure et un accompagnement soigné (+ tu l’auras compris, l’assurance de faire une bonne action). La librairie l’Instant résume cela très bien dans cette newsletter. Je t’invite à les contacter si ça t’intéresse, ils sont toujours d’excellents conseils.
Je sais que pour certains l’accès aux centres-villes et à ce type de commerce reste plus compliqué mais, il faut aussi rappeler que de nombreux sites permettent désormais de commander auprès de libraires indépendants : libraires.fr, lalibrairie.com et librairiesindependantes (auprès de certains libraires, ou en réservant en magasin).
On a toutes les cartes en main pour aider à préserver ces espaces de magie et de rêve dans nos villes. ✨
Tu sais tout, place au sujet du jour 🍭
Un enfant qui ne lit pas est-il voué à devenir un crétin ?
C’est le postulat de Michel Desmurget, chercheur spécialisé en neurosciences cognitives et auteur de Faites les lire, pour en finir avec le crétin digital, qui fait du bruit depuis sa parution il y a quelques semaines.
Sur le plateau de la Grande Librairie, il défend le pouvoir de la lecture et de la fiction sur la construction du cerveau des enfants. Développement neuronal, social, empathie, langage… on ne reviendra pas sur les nombreux bienfaits de la lecture.
Selon des recherches citées par Michel Desmurget (voir son livre, j’avoue, je n’ai pas vérifié toutes les sources mais sa bibliographie fait une cinquantaine de pages !), la lecture impacte positivement et significativement la réussite scolaire d’un enfant.
En tant que parent, ça donne tout de suite envie de se ruer sur le premier recueil de Prévert qui passe pour embarquer son enfant dans le monde merveilleux des mots et de la littérature.
Pas si vite !
Lire oui mais pas n’importe quoi, pas n’importe comment !
La lecture, dans les jeunes années, doit être abordée comme un moment de partage, pour transmettre surtout le plaisir de lire.
Il n’est pas question de le voir dès la petite école comme une occupation sérieuse et studieuse. On attendra un peu avant Tolstoï. L’important va être de créer un temps d’échange de qualité, autour de l’objet livre.
Michel Desmurget préconise de commencer la lecture partagée le plus tôt possible et de poursuivre au moins jusqu'à la fin du primaire voire le milieu du collège (p. 207).
Alors on lit quoi ?
Pour les bébés avant six mois / un an, les images à explorer ensemble vont avant tout être intéressantes pour les aider à découvrir le monde. Je te renvoie à cet article de Chloé Séguret (lectrice formatrice spécialiste de la lecture d’album) très complet sur la question, avec quelques recommandations d’ouvrages.
Mais rien n’empêche de lire aussi des histoires un peu plus longues (selon ton temps et tes capacités), pour commencer à cultiver ce fameux plaisir.
Outre le développement du cerveau, la lecture chez les tout-petits les aide à comprendre leur environnement et leur quotidien.
Les récits qui font la part belle aux situations vécues par les enfants et à la découverte du monde leur sont bénéfiques. Ils seront moins sensibles aux grands concepts et aux images très oniriques qui nous séduiraient davantage en tant qu’adultes.
Pour eux, Tchoupi va chez sa grand-mère est déjà une aventure captivante. À un âge où l’on apprend par imitation, avoir des exemples pour savoir comment se comporter dans telle ou telle situation va les soutenir dans leur développement.
Mais justement, Tchoupi, ce n’est pas un peu nulos ? 😏
Doit-on vraiment leur lire les histoires de ce personnage mi-ours, mi-panda (si quelqu’un peut me dire ce que c’est ?) qui ne fait que désobéir et tester les limites ?
Oui, c’est exactement de ce genre d’histoire dont ils ont besoin pour mettre en récit leur quotidien. Elles les aident à trouver des repères en s’identifiant à des personnages qui vivent ce qu’ils traversent. Alors après tout, vu comme ça, ce n’est pas plus mal que ces personnages ne soient pas trop genrés (encore que, petit ours brun et petit loup sont clairement des garçons !).
On a tendance à avoir peur de la dimension sérielle, à la chaîne, de ce genre d’ouvrages mais s’ils font de tels succès c’est (aussi) qu’ils sont bien adaptés aux attentes des petits.
Les livres vont également les aider à surmonter des épreuves.
La peur du noir, le pot, les émotions, la naissance d’un nouvel enfant… la fiction rassure, pose un cadre sur lequel se projeter et permet de tester ses limites sans expérimenter soi-même ses angoisses.
Choisis aussi des livres qui te plaisent.
On l’a dit, la lecture n’est pas un cours du soir, c’est un moment de plaisir ensemble. Alors autant que tu l’abordes aussi avec entrain et passion. Tu aimes les chats ? Dirige-toi vers ce type de livres (moi j’adore Une vie de chaton, mais attention il est long - et impossible de sauter des pages avec un enfant de deux ans aux aguets).
Tu as toujours eu un faible pour les voyages ? Explore les livres de ce côté-là.
Mais du coup, les histoires populaires et les contes de fées avec leur lot d’idées sexistes c’est out, non ? 👸
J’ai appris (dans ce podcast de Faites des gosses qui infuse cette édition et que je vous conseille d’écouter pour aller plus loin) qu’il y a un âge pour introduire les contes (plutôt autour de 5 à 6 ans, en fonction des histoires). Ils répondent à des angoisses et questions psychologiques qui touchent la plupart des enfants de ces âges et pourront les rassurer.
Les contes permettent aussi de penser la société dans laquelle on vit en interrogeant le pouvoir d’action, le consentement (et oui), la mixité… Ils encouragent les enfants (ici plus grands) à réflechir à ces enjeux. Il sera d’ailleurs intéressant de les aborder sous un angle féministe quand l’enfant sera en âge d’évaluer ces questions.
Pour commencer l’exploration des contes, vers l’âge de 3 ans, les 3 petits cochons est le plus accessible, selon Jennifer Tamas, professeure de littérature.
Ces dernières années, des initiatives extra voient le jour pour développer des histoires plus inclusives et en phase avec les nouvelles formes de parentalité.
J’ai spécialement remarqué les éditions Talents Hauts et On ne compte pas pour du beurre, plus inclusives qui mettent en scène des personnages hors des clichés et plus diversifiés (va voir leur catalogue, il y a vraiment des récits hors norme - au sens strict). C’est vivifiant de pouvoir offrir ce genre de représentations dès le plus jeune âge à ses enfants, et salutaire pour les familles moins traditionnelles !
Et pour les parents qui n’aiment ou ne peuvent pas lire ? 🤔
Force est de constater que ces injonctions pèsent (encore une fois) lourd sur les parents… Mais les éclairages sur le sujet sont là, chacun fera bien entendu ce qu’il peut à son niveau !
Retenons qu’en dehors de la teneur de la lecture, ce sera l’attention accordée aux enfants, le moment de partage autour d’un objet (le livre) qui permettra de faire naître un goût pour la littérature et cultiver les bienfaits qui vont de pair.
Le défi qui se cache derrière tout ça, bien sûr, est de les aider à résister à la tentation des écrans ; et ça commence aussi par donner l’exemple. 🫣
Qui cherchera à mettre plus de lecture dans sa vie se trouve en tout cas au bon endroit 😇.
Saluons enfin le travail des associations qui dès le plus jeune âge oeuvrent pour partager le plaisir de la lecture avec les enfants, quel que soit leur environnement social.
Si vous voulez également contribuer à l’accès à la lecture chez les publics moins favorisés, le Syndicat de la librairie française organise en ce moment l'opération solidaire Donnez à lire avec le Secours populaire.
Le principe : rendez-vous en librairie indépendante d’ici au 20 novembre et ajoutez un ouvrage jeunesse à votre panier. Votre libraire le récupère et le confie ensuite aux enfants du Secours populaire.
J’aurais pu consacrer bien plus de lignes à ce vaste sujet (peut-être y reviendra-t-on ? Si cela vous intéresse aussi), les échanges restent ouverts en commentaire.
Pour aller plus loin
👉 Plus de conseils pour développer le goût de la lecture de ton enfant.
👉 De chouettes activités (à Paris) autour de la lecture.
👉 Le podcast Faites de gosses sur ce thème.
Les trois livres préférés de ma fille de deux ans
Et de bon nombre d’autres enfants, promis.
👹 La couleur des émotions, version pop-up, Anna Llenas
Les émotions du monstre sont tout emmêlées : colère, tristesse, joie, sérénité, peur, aidons-le à les distinguer et à les ranger dans leur flacon.
Grâce à ce livre, nous avons trouvé une manière douce et ludique pour mettre le doigt sur ce qu’elle ressent et à « l’étiqueter ». C’est un grand classique pour les petits qui doivent traverser des tempêtes émotionnelles pour grandir. Il se décline également en livres pour chacune des émotions ; à explorer aussi.
Merci Johana et Chloë. 🥰
Sur ce thème, nous venons aussi de recevoir Grosse colère (merci Rafa) qui l’a déjà conquise. Elle est captivée par ce monstre de colère qui détruit tout sur son passage et finit par s’apaiser (espérons qu’elle y trouve une source d’inspiration 😉).
🥣 La soupe aux frites, Jean Leroy et Ella Charbon
Deux enfants crocodiles (les attachants Mim et Crocus) refusent de manger leur soupe… Mais surprise : c’est une soupe aux frites ! 😋
Quand on parlait d’apprendre la vie et de dépasser ses appréhensions, voici un bel exemple.
La soupe poireaux - pommes de terre est devenue, chez nous aussi, une soupe aux frites, on adore ! 😉
Merci Aurélie. 😘
🎭 La tirade du nez, Thierry Dedieu
Ce livre a été un coup de coeur pour nous et pour elle depuis ses neuf mois. Il reprend (en partie) la fameuse tirade du nez de Cyrano de Bergerac.
Découvert grâce à un ami (merci Benjamin), j’aurais aimé le connaitre plus tôt car cette collection au Seuil Jeunesse est parfaite pour les enfants de 0 à 3 ans.
Petits, ils seront subjugués par les grandes illustrations en noir et blanc qui correspondent à leur manière d’appréhender les images à cet âge. Puis, ils comprennent (et retiennent) de mieux en mieux le texte qui incite les parents à imiter, jouer, incarner l’histoire. Que ce soit la petite souris, la recette des crêpes, les crocodiles et autres comptines, les albums sont tous décalés et attachants.
Le seul bémol, le format ne rentre pas dans les bibliothèques (mais c’est une maniaque des livres bien ordonnés qui parle 🫣).
J’adore désormais offrir les ouvrages de cette collection aux nouveau-nés. Découvrez-les tous ici.
L’offre est si vaste, si variée, il y en a pour tous les goûts (des enfants comme des parents), toutes les envies et tous les styles.
Et on en a encore pour des années de découvertes ! 🤩
C’est tout pour aujourd’hui ! 👶
Rendez-vous dans deux semaines avec un retour à la littérature adulte.
D’ici là, lisez bien en famille (ou tout·e seul·e caché·e sous la couette). 👋
J'adore votre question finale. Comment transmettre le goût de la lecture quand on n'aime pas lire ? Et j'aime l'idée de rappeler que les livres ont le même prix partout. Comme le tabac finalement. C'est parce qu'on finit par devenir accro peut-être ?
Trop bien ta newsletter, Julia, qu'on soit parents ou pas (encore).
C'est peut-être l'ancienne libraire qui parle, mais gros plaisir de découvrir quelques maisons que je ne connaissais pas - et bon sang que ça foisonne en jeunesse ! Ca m'a beaucoup touchée, de voir le sujet du premier livre en homepage d'On ne compte pas pour du beurre, je m'y reconnais évidemment... En tout cas, hâte de découvrir de prochaines news sur les livres pour les petits !